La distinction de Pierre Bourdieu est l’un des contributions les plus distinguées à la théorie et à la recherche sociales de ces dernières années… Il y a dans ce livre un compte rendu de la culture et une méthodologie de son étude, riche en implications pour une diversité de domaines de la recherche sociale. Le travail redéfinit à certains égards toute la portée des études culturelles (Anthony Giddens).
Éditeur | Les Éditions de Minuit |
---|---|
Année | 1979 |
Pages | 670 |
Taille du fichier | 45.1 MB |
Format |
“Classeurs classés par leurs classements, les sujets sociaux se distinguent par les distinctions qu’ils opèrent — entre le savoureux et l’insipide, le beau et le laid, le chic et le chiqué, le distingué et le vulgaire — et où s’exprime ou se trahit leur position dans les classements objectifs. L’analyse des relations entre les systèmes de classement (le goût) et les conditions d’existence (la classe sociale) qu’ils retraduisent sous une forme transfigurée dans des choix objectivement systématiques (« la classe ») conduit ainsi à une critique sociale du jugement qui est inséparablement un tableau des classes sociales et des styles de vie.
On pourrait, à titre d’hygiène critique, commencer la lecture par le chapitre final, intitulé Eléments pour une critique « vulgaire » des critiques « pures », qui porte au jour les catégories sociales de perception et d’appréciation que Kant met en oeuvre dans son analyse du jugement de goût. Mais l’essentiel est dans la recherche qui, au prix d’un énorme travail d’enquête empirique et de critique théorique, conduit à une reformulation de toutes les interrogations traditionnelles sur le beau, l’art, le goût, la culture.
L’art est un des lieux par excellence de la dénégation du monde social. La rupture, que suppose et accomplit le travail scientifique, avec tout ce que le discours a pour fonction ordinaire de célébrer, supposait que l’on ait recours, dans l’exposition des résultats, à un langage nouveau, juxtaposant la construction théorique et les faits qu’elle porte au jour, mêlant le graphique et la photographie, l’analyse conceptuelle et l’interview, le modèle et le document.
Contre le discours ni vrai ni faux, ni vérifiable ni falsifiable, ni théorique ni empirique qui, comme Racine ne parlait pas de vaches mais de génisses, ne peut parler du Smig ou des maillots de corps de la classe ouvrière mais seulement du «mode de production» et du « prolétariat » ou des « rôles » et des « attitudes » de la « lower middle class », il ne suffit pas de démontrer : il faut montrer, des objets et même des personnes, faire toucher du doigt — ce qui ne veut pas dire montrer du doigt, mettre à l’index — et tâcher ainsi de forcer le retour du refoulé en niant la dénégation sous toutes ses formes, dont la moindre n’est pas le radicalisme hyperbolique de certain discours révolutionnaire.”
Quatrième de couverture, La distinction
"Il est peu de cas où la sociologie ressemble autant à une psychanalyse sociale que lorsqu'elle s’affronte à un objet comme le goût, un des enjeux les plus vitaux des luttes dont le champ de la classe dominante et le champ de production culturelle sont le lieu. Pas seulement parce que le jugement de goût est la manifestation suprême du discernement qui, réconciliant l’entendement et la sensibilité, le pédant qui comprend sans ressentir et le mondain qui jouit sans comprendre, définit l’homme accompli. Pas seulement parce que toutes les bienséances désignent d’avance le projet de définir cet indéfinissable comme une manifestation évidente de philistinisme : la bienséance universitaire qui, de Riegl et Wôlfflin à Elie Faure et Henri Focillon et des commentateurs les plus scolaires des classiques aux sémiologues d’avant-garde, impose une lecture formaliste de l’oeuvre d’art aussi bien que la bienséance mondaine qui, faisant du goût un des indices les plus sûrs de la vraie noblesse, ne peut concevoir qu’on le rapporte à autre chose qu’à lui-même.
La sociologie est là sur le terrain par excellence de la dénégation du social. Il ne lui suffit pas de combattre les évidences premières ; de rapporter le goût, ce principe incréé de toute «création», aux conditions sociales dont il est le produit, en sachant bien que les mêmes qui s’acharnent à refouler l’évidence de la relation entre le goût et l'éducation, entre la culture au sens d’état de ce qui est cultivé et la culture comme action de cultiver, s’étonneront qu’on puisse dépenser autant de peine à prouver scientifiquement cette évidence. Il lui faut encore interroger cette relation qui n’est autoexplicative qu’en apparence..."
Titre | La distinction Pierre Bourdieu |
---|---|
Sous-titre | Critique sociale du jugement |
Auteur | Pierre Bourdieu |
Éditeur | Les Éditions de Minuit |
Date | 1979 |
Pages | 670 |
Pays | France |
ISBN | 9782707302755 |
Format | |
URL | Télécharger Pierre Bourdieu La distinction Pierre Bourdieu pdf |